je veux encore rouler des hanches,

je veux me saouler de printemps

je veux m'en payer des nuits blanches

à cœur qui bat, à cœur battant

avant que sonne l'heure blême

et jusqu'à mon souffle dernier

je veux encore dire "je t'aime"

et vouloir mourir d'aimer

Barbara

jeudi 30 décembre 2010

Philip Roth : Patrimoine, une histoire vraie

Dans ce livre Philip Roth rend un hommage vibrant et sincère à son père Hermann, disparu en 1989.
Nous suivons la fin de vie de cet homme, depuis le diagnostic de sa tumeur au cerveau à son décès à l'hôpital. Nous assistons à la dégradation physique d'un homme. Il livre son dernier combat en refusant la vieillesse et la maladie. Son fils l'accompagnera, deviendra le parent et s'occupera de lui jusqu'au bout.
C'est dur, les détails pénibles et pourtant le lecteur retrouve dans ce court texte, les thèmes chers à Philip Roth. La vieillesse, la maladie, la mort, l'amour, l'humour juif font partie du manège littéraire de cet auteur.
L'écriture est magnifique. Philip Roth se dévoile avec beaucoup de sensibilité, sans atermoiement, et fait son travail de deuil en écrivant un très beau témoignage d'amour filial.
Philip Roth, écrivain hors norme, nous offre ici un texte intime d'une grande puissance.

mercredi 29 décembre 2010

Jérôme Ferrari : Où j'ai laissé mon âme

"Aucune victime n'a jamais eu le moindre mal à se transformer en bourreau, au plus petit changement de circonstances", c'est la confession du lieutenant Andreani à son capitaine Degorce, mais c'est surtout la confession d'un homme à un autre.
Le dernier livre de Jérôme Ferrari pour lequel il a obtenu le Prix France Télévision, sert une histoire profonde et émouvante. Ecrit en trois chapitres faisant référence à la passion du Christ, il raconte trois jours, les 27, 28 et 29 mars 1957 pendant la guerre d'Algérie. Réunis dans une villa d' Alger, les deux hommes mettent en place les moyens pour neutraliser l'armée de libération de l'Algérie. Tous les moyens nécessaires afin d'obtenir les renseignements, même la torture, la gégène.
Dans cette maison d'Alger va se jouer une partie de leur histoire. Le chef des rebelles surnommé Tahar est arrêté. Terroriste responsable d'atrocités et de sang français versé, c'est l'occasion pour Andreani de remplir son devoir.
Les souvenirs tourmentent Degorce . Déporté à 19 ans au camp de Buchenwald, combattant pendant la guerre d'Indochine, survivant des terribles combats de Dien Bien Phu il a survécu au camp de rééducation où il a rencontré Andreani. Degorce, rempli de contradictions, n'y croit plus, culpabilise, s'interroge, cherche la rédemption et trouve dans ses visites à Tahar dans sa cellule un peu de lumière, peut être des explications ou une certaine sérénité.
Quarante ans plus tard, face à lui dans un appel muet puisque sans réponse, Andreani lui rappelle l'admiration qu'il lui portait. Dans un monologue lancinant et puissant il interpelle son capitaine sur l'honneur de la France, la fidélité, lui rappelle les années de fraternité dans le combat mais aussi ses manquements.
Un livre d'une grande force où le monologue d'Andreani sans date ni lieu souligne l'intemporalité des questions posées. Mémoire et oubli. Prendre part ou pas, empêcher ou commettre, voir et ne rien dire.
Dans une écriture forte, l'auteur nous offre un texte d'une grande beauté qui appelle à la réflexion sur le sens de l'honneur et du devoir, la honte de soi dans une morale sans issue.

Kéthévane DAVRICHEWY : La mer noire

L'auteur raconte une journée d'anniversaire, celui de son héroïne, Mamouna. Elle a 90 ans et c'est l'occasion de réunir une nouvelle fois toute la famille : des plus jeunes aux plus anciens. C'est l'occasion aussi pendant cette journée d'évoquer le passé. Exilée à Paris avec ses parents suite à la prise de pouvoir par les communistes en Géorgie, Mamouna se souvient de Batoumi la ville de sa jeunesse. Sont alors évoqués les coutumes géorgiennes toujours vivantes, le retour au pays , la famille restée là-bas, les amitiés et les amours. Petits et grands malheurs.
Deux histoires qui se mêlent avec pour fil rouge : Tamaz, le premier amour de Mamouna pendant un bel été de sa jeunesse. Ces deux êtres se sont passionnément aimés, l'exil les a séparés. C'est l'amour de toute une vie. Sublimé par l'absence, il reste très fort et très beau par la certitude de son existence à travers le temps et la distance.
Ce soir d'anniversaire, Tamaz sera là. Mamouna l'attend et le lecteur aussi.
L'auteur nous offre le portrait d'une belle vieille dame, indépendante, aimante même si elle ne sait pas donner des gestes d'affection. Elle reste fidèle à ses souvenirs dont elle a tiré toute sa force. Toute sa vie, Tamaz l'absent, est près d'elle comme une réalité sereine.
Le style est vif, rapide pour symboliser cette journée , à l'image de cette famille bruyante, attachante qui prépare la fête. Le récit de l'exil est fluide et la description de la vie passée très lumineuse. De très belles phrases d'amour sont prononcées par Tamaz et c'est bon de les lire.

dimanche 19 décembre 2010

Agnès Desarthe : Dans la nuit brune

Dans un village un peu perdu, Jérôme, la cinquantaine, est désespéré par l'immense chagrin de sa fille Marina. C'est en effet par le décès de son petit copain dans un violent accident de moto, que commence le livre.
Père et fille vivent ensemble depuis le divorce des parents et le départ de la mère dans le sud de la France. Jérôme, enfant trouvé, enfant sauvage de la forêt recueilli par des parents adoptifs aimants, va revivre dans ce drame son enfance et sa vie remplies de manquement et d'abandon.
Avec l'aide d'un ancien policier à la retraite, Jérôme, mettra une lumière sur son passé, des réponses à ses questions. Aussi douloureuses soient elles, elles l'aideront à continuer. Le roman prend des allures d'enquête policière. Secrets de famille, secrets de l'Histoire autant de labyrinthes dans lesquels le héros poursuit sa quête identitaire.
Dans un style clair, Agnès Desarthe, nous plonge dans la part d'ombre cachée au plus profond de nous. Ses héros sont des êtres ayant perdu l'habitude de parler, n'y arrivant pas ou plus. Ils luttent, souffrent et résistent. Un nouveau départ, un nouvel abandon leur sont nécessaires pour retrouver le chemin de l'amour. Beaucoup de thèmes sont abordés ici, comme le deuil, la relation parents-enfants, le divorce, l'identité, l'homosexualité. Agnès Desarthe joue entre violence et douceur, ombre et lumière, vérité et fantastique.
Comme à chaque fois, c'est par et de la nature, aussi douce que violente, que viendra l'apaisement.
Un très bon roman récompensé par le prix Renaudot des lycéens 2010, même si parfois certaines longueurs atténuent la tension psychologique.





dimanche 12 décembre 2010

Hubert Selby Jr : Last exit to Brooklyn

Ce premier roman de l'auteur américain maudit mais désormais mythique est paru dans les années 60, il a d'ailleurs été interdit en Angleterre et dans plusieurs Etats américains pour obscénités.
6 nouvelles, 6 portraits de personnages qui vont se croiser dans et autour d'un bar grec minable de Brooklyn des années 50 près d'une base militaire. Dans le sexe, la violence, l'alcool ces êtres vont essayer de trouver une sortie de secours à leur misérable existence. A travers ces portraits sans aucune lumière d'espoir Selby nous invite dans une traversée des bas-fonds de l'âme.
Travestis, prostitués, homosexuels sont à la dérive dans un univers qui n'offre que la désillusion. Ils cherchent jusqu'au bout de la nuit, des moments d'apaisement. Quand il y arrivent la chute est tellement violente et sordide que le lecteur ne les souhaitent plus.
Les personnages mènent tous la même vie minable, la société est pourrie, aucun dialogue possible, la violence comme distraction, le quotidien sans espoir et les enfants qui seront comme les parents.
Harry, homosexuel refoulé, ignoble avec sa femme, Tralala jeune fille paumée cherchant juste un peu de chaleur et qui finira massacrée, Georgette le travesti poète humilié... tous se retrouvent dans le pitoyable manège d'une vie où la raison a été bannie.
Le lecteur ne peut s'attacher à ces personnages ambigus, pervers et tout au long de la lecture balance entre pitié et dégoût.
On ne peut qu' être fasciné par l'écriture de Selby, directe, sèche, avec des dialogues d'une âpreté extrême amplifiant la sensation de désespoir. Les échanges entre Vinnie et Mary, écrits en majuscules, sont d'une force inouïe. Le lecteur assiste à leurs engueulades. Le manque de ponctuation crée une atmosphère de marginalité.
C'est quand même un livre qui remue, Selby écrivain de talent nous plonge dans une description d'une faune underground assez stupéfiante.



mercredi 8 décembre 2010

Zoé Wicomb : Des vies sans couleur

Le roman se situe en Afrique du Sud, au Cap, et met en scène Marion Afrikaaner qui va se trouver confrontée à une quête de ses origines dans un pays post apartheid.
L'héroïne est une jeune femme moderne, indépendante, ambitieuse directrice d' une agence de voyages. La nuit l'angoisse l'étreint. Tout bascule le jour où dans un journal, la photo d'une militante noire de l'ANC de Mendela, la ramène à des souvenirs cachés de son enfance. Elle est certaine de reconnaître une personne connue, aimée, une impression familière.
Face au silence de son père, elle partira à la découverte de la vérité dissimulée par ses parents. Mensonges, silences, oubli ont dépouillé son enfance de sa véritable histoire. Cette photo lui impose le souvenir et le devoir de mémoire.
C'est l'histoire des métis, où dans la douloureuse période de l'Apartheid, être ni noir ni blanc n'était pas une couleur. Aussi pour contrer les lois, certains métis on choisi quand ils le pouvaient de se faire reconnaître comme blancs. La couleur de la réussite.
C'est l'histoire d'un dépouillement d'identité, d'une honte, des origines reniées, du poids du mensonge que l'héroïne va découvrir.
Construit d'une manière subtile, l'écriture enchante par son rythme et ses expressions en afrikaaner et enchaîne les interrogations de celle qui cherche. Au delà de la quête intime c'est l'histoire de l'Afrique du Sud post-apartheid multiraciale. Toujours divisée entre plusieurs races et ethnies qui n'arrivent pas à vivre ensemble sereinement mais qui pourtant se mêlent. Les métis représentent cette souffrance qui persiste encore.
Zoé Wicomb à travers ce roman, nous montre que l'idée de l'identité et de l'origine doit dépasser le constat de l'apparence, et que dans un pays confronté à la violence le métissage est une belle histoire.

lundi 6 décembre 2010

Frédérick Busch : Nord

Jack, ancien policier militaire, est devenu vigile dans un complexe hôtelier où il fait alors la connaissance d'une avocate en la sauvant d'une mauvaise rencontre. Elle lui demande de chercher son neveu disparu dans le nord de l'état de New York. Un endroit que notre héros connaît bien, il y a vécu les plus tragiques périodes de sa vie, en perdu sa femme et sa petite fille. Une région où l'hiver est toujours sur le point d'arriver ou de finir. En acceptant cette mission, Jack se retrouve face à son passé, à ses souvenirs, à ses questions restées sans réponse.
Le dernier roman de Frédérick Busch, décédé en 2006, mêle enquête policière et drame psychologique.
Les personnages, hommes ou femmes, ont été marqués par les coups que la vie distribue souvent.Comme Jack, ce sont des écorchés vifs que le lecteur croise dans ce retour au pays, au passé qui continue de hanter toujours.
C'est un roman noir au suspense soutenu, la description des souffrances psychologies ou physique sont faites avec beaucoup de sensibilité. L'auteur sait très bien nous plonger dans l'ambiance de ces paysages nord américains assez désolés, rudes où le climat difficile isole et façonne, les coyotes hurlent, le whisky devient un compagnon quotidien. L'envie de partir ailleurs tenaille les êtres noyés dans un désespoir climatique et affectif.
En enquêtant sur ce jeune homme disparu, Jack habité par les morts de sa vie retrouvera les traces de son passé, une dernière fois, pour enfin continuer la route.
Dans une écriture sensible et sensuelle, l'auteur offre un dernier livre emprunt d'une grande émotion.

Robert Goolrick : Féroces

Robert Goolrick est un écrivain américain, c'est aussi mon coup de coeur et découverte de cette rentrée littéraire.
J'ai commencé ce livre avec beaucoup de plaisir dans la description de cette famille drôle, originale, intelligente, aimant la fête et les cocktails et fréquentant la société sudiste de Virginie. Nous sommes dans l'Amérique des années 50 et l'auteur évoque ses parents et son enfance.
La description de ces années est teintée d'une couleur au charme passé, le lecteur sourit des extravagances de ce couple. Ils boivent un peu trop c'est vrai, aiment les soirées mondaines et les bons mots et ils sont si beaux , si brillants. Bien sûr ils ont du mal à joindre les deux bouts mais ils sont gais et tout est possible pour eux.
Il y a de l'humour dans l'évocation des années passées et l'écriture est puissante, intimiste, élégante, violente parfois dans le constat.
Puis le ton se fait plus grave et dans un souffle et des mots d'une grande beauté le lecteur est saisi par le témoignage, par ce long monologue insoutenable.
Sans se rendre compte chaque fête, chaque ivresse, chaque mot nous emmènent vers le mal, vers l'effroi. La révélation est implacable par la justesse de chaque mot.
L'écriture reste belle, elle devient douleur, elle percute, elle assomme. Sans cri mais avec une haine pour ses ignobles géniteurs, Goolrick nous raconte pourquoi il écrit, comment il s'en est sorti.
Il a vécu une enfance dévastée, a failli mourir mille fois et il porte sur la vie un regard désabusé et sur sa famille celui du petit garçon qu'il n'a jamais été.
Ce que je trouve "féroce" c'est que justement ses parents sont tout sauf féroces. Ils sont alcooliques, ils sont pauvres, tristes, perdus et tout simplement pitoyables dans une Amérique qui ne supporte que les apparences.
Une autobiographie qui se découvre à la fin et une fois refermée qui nous laisse KO.


dimanche 21 novembre 2010

Maylis de Kerangal : Naissance d'un pont

C'est l'histoire de la construction d'un pont autoroutier ainsi que celle des hommes et femmes associés à cette prodigieuse entreprise. Le chantier se situe quelque part en Californie, dans une ville imaginaire Coca, un trou perdu. En reliant les deux rives du fleuve, la construction du pont met en scène des destins, des enjeux politiques et économiques, des luttes sur fond de bouleversement de l'écosystème et de la future condition de vie des Indiens vivant dans la forêt.
Jusqu'à son inauguration, le lecteur découvre la naissance du pont, ses forces et ses faiblesses et côtoie les protagonistes au coeur de leur vie dans ce qu'il y a de plus intime.
C'est un sujet très original, le pont servant de décor à ce roman avec tous ces héros aux personnalités fortes, rares et attachantes qui convergent vers leur destinée. Venant des quatre coins du monde, ingénieurs, grutiers, architectes, spécialiste du béton...tous vont se croiser, se déchirer, se soutenir pendant cette construction.
La description des paysages est très aboutie, et la forêt avec son dégradé de vert, d'ombre et de lumière est très envoûtante. Que ce soit au sommet de la grue, dans les entrailles du pont la vue de la ville est remarquablement bien décrite.
Prix Médicis 2010 pour ce roman, Maylis de Kerangal possède une écriture vive, nerveuse, précise aussi organisée que ce chantier gigantesque.
Beaucoup de termes techniques précis ainsi que la description des origines de la ville peuvent lasser mais l'auteur sait nous captiver par son style et son rythme et l'histoire reprend vite.




samedi 6 novembre 2010

Michel Houellebecq : La carte et le territoire

Prix Goncourt 2010 pour ce roman sorti sans agitation et pour lequel l'auteur surprend pas son excès de modération. Sans putes, sans partouzes, sans sexe et sans provocation il n'en reste pas moins un livre très visionnaire. Servi par une écriture fluide, recherchée et compréhensible, le roman offre un ton plus désabusé et certainement plus sombre.
La construction littéraire est originale et surprenante. Autant de tiroirs à ouvrir, autant de jeux de miroirs vont permettre à l'auteur de réaliser un autoportrait saisissant, parfois comique, parfois surprenant en tout cas plus humain.
C'est l'histoire de Jed, artiste qui devient célèbre après avoir rencontré et perdu une jeune femme russe, Olga. Il deviendra ou essaiera de devenir l'ami de l'écrivain Houellebecq, retiré en Irlande rangé et revenu de tout pour disparaître complètement. Le lecteur croise la route du père de Jed, d'un inspecteur de police sans enfant mais père d'un bichon. Enfin tout l'univers de l'auteur est là. Il aborde comme un sociologue tous les problèmes de notre société d'une façon magistrale : l'art, l'argent, l'amour (jamais là quand il faut), la vieillesse, la fin de vie, la solitude enfin tous les murmures de la vie.
Si l'on croise des "people"après tout pourquoi pas ? Ils sont vus partout par des millions de personnes.
C'est un livre sombre avec un humour un peu acide parfois, Houellebecq le confirme , comme ses héros qui représentent des portraits de l'auteur (Jed, le père même le chien "Michou") il est loin du monde et de ses griffes. Il se veut plus calme (crise de la cinquantaine ?) et n'attend plus rien.
J'ai préféré le ton plus percutant et dérangeant de son roman "Les particules élémentaires", c'était un livre très audacieux.




vendredi 5 novembre 2010

Sofi Oksanen : Purge

Prix Femina Etranger 2010, Sofi Oksanen débute son roman Purge en 1992. Avec l'effondrement de l'Union Soviétique, l'Estonie fête le départ de l'armée russe. D'abord annexé par l'Allemagne en guerre, le pays subira à partir de 1940 plus de 50 ans d'occupation communiste soviétique. Une vie sous surveillance où les mots n'existaient pas pour dénoncer les souffrances physiques et psychologiques subies.
A travers le destin de deux femmes nous comprenons peu à peu le prix de l'existence de ces épouses, mères, filles dans la tragédie de l'histoire. L'écriture est perspicace et devient un véritable suspense que le lecteur suit jusqu'au bout.
Aliide, vieille femme devenue la mémoire de l'ancienne Estonie, nous entraîne dans les secrets de sa vie. Elle s'est adaptée à l'histoire pour cacher son histoire de coeur. Trahison, mensonge, silence, accusation, les conditions de vie sont dures et insoutenables. Sa rencontre avec Zara, jeune russe échouée dans son jardin, fuyant son proxénète lui apportera un nouveau souffle.
Un lourd secret de familles lié à cette période de l'occupation soviétique les unira malgré elles.D'abord réticente, Aliide aura une largesse d'esprit dans son écoute et revivra alors des souvenirs dramatiques. L'histoire d'amour qu'elle a ratée a été source d'actes de collaboration. Terrible et douloureux dilemme.
Si le livre retrace la tragédie de l'Estonie pendant ses années les plus sombres (1940-1990), il interroge aussi et pose de bien embarrassantes questions. Comment en effet vivre dans un pays occupé ? Jusqu'où peut-on aller sans se compromettre ? Trahisons, actes de collaboration qui peut ou doit juger une fois les occupants partis ?
Ce livre est un témoignage bouleversant sur la condition des femmes dans un pays occupé et un récit remarquable sur l'histoire de l'Estonie.




samedi 30 octobre 2010

Philippe DEBLAISE : Mes arbres à histoires

Le dernier livre de Philippe Deblaise est aussi savoureux à lire qu'à regarder. La couverture accroche et nous invite à la découverte.
Les photos de l'artiste de Saintes, Jean Charles Folliet apportent un esthétisme épuré et les illustrations du peintre Jean-Pierre Blanchard complètent chaleureusement l'ouvrage. L'auteur met en scène 15 arbres de la région de Saintonge à travers 15 nouvelles qu'il a voulues purement romanesques.
Amoureux de la nature et très attaché à sa région, Philippe Deblaise rend ici hommage à ces arbres témoins des petites et grandes histoires et qui ont traversé le temps pour nous les raconter.
Une balade dans une forêt où l'imaginaire tenace nous emporte vers des temps malheureusement révolus quand les hommes savaient écouter le langage de la nature.
Du 16 ème siècle à nos jours, Philippe Deblaise nous promène et c'est au pied de ses pins, chênes, acacias, peupliers, qu'il nous conte ses histoires. Ces arbres existent vraiment et si la fiction rencontre la réalité en croisant la route de personnages du coin tels que Bernard Palissy, de Philibert Hamelin pasteur à Saintes, elle souffle au lecteur une véritable nostalgie poétique.
Croqués avec beaucoup d'humour et un certain réalisme, les héros de ces nouvelles sont rattrapés par le temps, l'Histoire, leurs sentiments, leurs envies et rancoeurs et par la nature qui toujours reprend ses droits.
J'ai beaucoup aimé cette promenade dans une région que l'auteur affectionne particulièrement et sait rendre attachante . Ce sont de belles pages à lire et à regarder. Un exercice rare de nos jours où les images remplacent trop facilement les mots.

vendredi 29 octobre 2010

Arnost LUSTIG : Elle avait les yeux verts

Arnost Lustig écrivain tchèque, est né en 1926. De sa douloureuse et terrible expérience dans les camps de la mort, il fera le pilier de ses oeuvres. Ecrit en 2000, ce livre raconte la confession intime et terrifiante d'une toute jeune fille de 15 ans sur l'horreur subie à Auschwitz.
Les livres de Lustig donnent la parole aux femmes, mères, filles, épouses que les nazis ont violées, tuées, massacrées dans une organisation minutieuse et diabolique de destruction totale.
Celles qui ont réchappé à l'enfer, ne sont pas sorties indemnes et ont traîné toute leur vie le poids des humiliations et souffrances subies ainsi que celui de leur survie.
C'est l'histoire d'Hanka, jeune tchèque de 15 ans d'origine juive. Toute sa famille a été assassinée à son arrivée à Auschwitz. Réquisitionnée pour travailler dans le laboratoire du camp au prix de sa stérilisation, elle survivra en se faisant passer pour une aryenne et intégrera le bordel de campagne "232 Est".
A son quotidien fait de privations, d'humiliation, du décompte des hommes qui passeront sur elle, elle s'interroge sur sa légitimité d'être en vie pour avoir renier son identité, ses origines. Héroïsme ou lâcheté ? Pute même de force des allemands n'est ce pas aussi de la collaboration ? Hasard ou volonté ? Dans quel état sort on de telles brutalités et sévices subis ?
Le livre atteint une intensité insoutenable lors d'une scène de "rencontre" avec un officier allemand membre très actif d'une unité mobile d'extermination. Le huis-clos étouffant confronte d'une part la cruauté d'une idéologie mise en place par un pouvoir dément et l'impuissance, la peur de l'autre. Le jeune homme vomissant les juifs et la prostituée moins que rien puisque pute et juive dissimulée. La toute puissance face à l'inexistence. C'est insoutenable. La tension atteint un degré éprouvant à l'évocation de la poésie prisée par le jeune officier pendant cette rencontre écoeurante.
Inutile de raconter plus. L'histoire, les humiliations, le froid, le désespoir, la mort, les rescapés. L'écriture est incisive, sèche. Le lecteur est pris par ce témoignage précis comme un état des lieux. C'est un livre que l'on ne peut pas lâcher. Hanka surnommée Fine dans le bordel nous parle dans un souffle de son calvaire.
Il n'y aura jamais trop de témoignages, il n'y aura jamais assez de récits pour raconter l'horreur. Quelques auteurs ayant vécu la Shoah sont encore en vie, en écrivant ces livres ils veulent transmettre le devoir de mémoire. C'est nécessaire. Alors lisons les, pour ne pas oublier.



lundi 25 octobre 2010

Blandine le Callet : La ballade de Lila K.

C'est le roman d'une quête, une ballade à une voix, celle de la narratrice, Lila. Le lecteur se trouve plongé en 2090 dans un futur organisé et aseptisé vu par le regard de cette toute jeune femme.
Lila nous raconte son histoire à la première personne sur un rythme vif, le lecteur vit son quotidien.
Quand elle avait 4 ans, Lila a vu surgir des hommes en noir un matin pour arrêter sa mère. Elle garde l'image d'une robe rouge et une sensation de douceur la saisit à son évocation. Placée dans un Centre, elle doit tout réapprendre : se nourrir, parler, se reconstruire physiquement et moralement et surtout oublier son passé.
Dans un quotidien formaté où tout est sous surveillance, elle rencontrera pourtant des personnages qui l'aideront dans son parcours initiatique. Intelligente, caustique et surtout très belle, Lila continuera par tous les moyens à retrouver sa Mère et ses souvenirs d'enfance.
Dans une société qui interdit les livres car trop dangereux (?), qui impose des séances de plaisir mécanique obligatoire, Lila est déterminée à comprendre et avoir confiance en elle.
Dans un Centre qui ressemble à la DDASS, dans un Paris où les libertés sont bafouées et où règne la censure, avec une banlieue appelé la Zone ( ?....) c'est surtout les scènes de grande sensualité qui sont touchantes. Quand Lila découvre qu'elle est belle, elle ne le savait pas avant. Quand elle découvre tout simplement l' Amour : pour sa Mère, pour ses professeurs, pour l' Autre.
Le futur sert de décor à ce roman à l'écriture nerveuse, vive où les pensées les plus intimes de la narratrice la rendent encore plus attachante. C'est le roman de la recherche de la mère disparue et de son amour pour elle malgré les souffrances endurées. C'est le roman de l'apprentissage au monde, à la connaissance de soi et des autres, à l'amour.


mardi 12 octobre 2010

Philip Roth : Exit le fantôme

Dans ce roman Philip Roth met en scène le retour à New York de son alter ego le plus intime, son double littéraire, le romancier de papier inventé il y a 30 ans, Nathan Zuckerman. Ils ont vieilli ensemble. Qu'il soit le héros principal ou un personnage secondaire, il est la voix de Roth dans ses livres. Il connaît ses doutes, ses certitudes sur la vie, les amours, la maladie et surtout ce douloureux et difficile exercice qu'est la vieillesse. Sa vision du monde et des autres reste toujours marquée d'humour et d'intelligence.
Nathan Zuckerman maintenant septuagénaire est un écrivain brillant et reconnu. Il s'est retiré depuis 11 ans dans le Massachussetts où il vit en solitaire, rangé des amours, de la vie même. Opéré d'un cancer de la prostate, il doit revenir à New York pour se faire soigner et espère ainsi retrouver vigueur(il est impuissant) et dignité (il est incontinent).
Il retrouve vite ses repaires dans la Grosse Pomme, malgré le traumatisme post 11 sept. et la réélection de Bush. Il fait la connaissance d'un jeune couple d'écrivains, d'un journaliste ambitieux et d'une ancienne connaissance, une femme qu'il avait connu dans sa jeunesse. Il est pris d'un désir fou pour Jamie la jeune épouse.
Et si tout était à nouveau possible ? L'espoir et le désir sont là intacts.
Le livre offre la vision de Roth sur le monde littéraire, politique de son pays. Il nous raconte son épopée à travers le temps par son héros. Le monde a changé, lui aussi au seuil de la vieillesse , il subit la dégradation physique, la mémoire s'abîme. Un profond sentiment de vide s'empare du lecteur.
Exit, l'écrivain flamboyant se retire. Reste l'écriture de Roth, superbe, maîtrisée sans apitoiement, l'humour est toujours présent pour déjouer le désespoir. Roth est un éternel révolté, contre son pays, sa politique, la bêtise. L'écriture lui impose de survivre même si tout semble lui indiquer la fin du chemin.



Jim Harrison : Une odyssée américaine

Jim Harrison, surnommé par ses fans "l'ogre du Montana", nous invite dans ce livre à prendre la route avec son héros Cliff. Ce dernier, 62 ans, ancien universitaire reconverti depuis longtemps en fermier, vient d'être quitté par sa femme. Plus triste par la mort de sa chienne que par son départ à elle , il décide de partir et de traverser les Etats Unis. Espérant trouver un second souffle, retrouver les racines même de ce pays si controversé et donneur de leçons, il est rejoint dans sa folle équipée par une ancienne étudiante. Une relation complètement déjantée naît entre eux basée sur le sexe, la bonne bouffe et des dialogues d'une grande vulgarité. Cliff se lasse ( et nous aussi) de se faire envahir par cette femme accro au téléphone portable et surtout complètement nymphomane.
Amoureux de la nature, des grands espaces de l'Ouest américain, des femmes et de cette véritable identité indienne oubliée par l' Amérique bien pensante , Jim Harrison reprend ses thèmes favoris : l'amour de la liberté, la critique de la société trop futile et aussi la vie qui peut se reconstruire à tout âge.
La description des grands espaces nous émeut toujours, la reconnaissance du peuple indien dans la volonté de Cliff de rebaptiser les états qu'il traverse du nom d'une tribu peut être prometteur et intéressant.
J'ai pourtant été déçue par trop de clichés (le fils cinéaste branché homo), des attitudes et des mots qui s'obstinent dans trop de grossièreté.
Et puis la fin représente un cliché de trop, l'épouse infidèle quittée à son tour revient et demande au mari de bien vouloir rentrer lui aussi....
Dommage j'avais beaucoup aimé Dalva, et ce road-movie était si tentant et aurait pu représenter une vraie quête. Elle devient uniquement une partie de jambes en l'air.

samedi 2 octobre 2010

J.M. Coetzee : L'été de la vie

Dans son dernier roman, l'auteur du Prix Nobel de Littérature 2003, nous livre une autobiographie fictive et avec une pudeur magnifique nous dévoile ses échecs et sa profonde tristesse. Coetzee entame le récit de ses confessions imaginaires puisqu'il est mort. En effet, un jeune biographe désire raconter la vie du grand écrivain disparu en s'appuyant sur des notes concernant les années 1972-1975. Elles marquent son retour d'exil et seront les plus décisives. Il vit à cette époque dans une maison délabrée du Cap avec son père. Il est seul avec d'énormes problèmes d'adaptation dans un pays marqué par l'apartheid.
Afin de réaliser sa biographie, Mr Vincent va rencontrer 4 femmes et 1 homme qui d'après les notes de l'auteur ont comptés dans sa vie. A travers ces entrevues, les anecdotes nous brossent le portrait d'un jeune homme égoïste, peu sensible, insignifiant et froid. Quant aux femmes, elles n'ont pas succombé au charme de ce pathétique amant. Finalement c'est la description d'un homme ordinaire et sans talent. Que ce soit sur le plan personnel et intime que professionnel, il n'a jamais été brillant. Voilà comment se présente Coetzee. Si le lecteur est surpris, il est ému par son courage à se dévoiler de la sorte. Mais ce qu'il faut voir au delà de ses secrets, de ses manques, c'est la préparation de cet homme dans l'été de sa vie, si triste fut-il, à son oeuvre littéraire à venir. Il brosse le portrait d'un pays qui se décompose et d'une politique qui met en place un système impitoyable de cruauté. Il nous donne les clefs pour comprendre la profonde désillusion même si le combat des Noirs est légitime. Avec le coeur sec comme le Bush, il raconte son amour pour les paysages sud-africains et pour un passé enfui.
Mémoires d'un naufragé mais aussi récit d'un auteur brillant qui sait manier avec talent la part de fiction présente dans toute existence. Coetzee se raconte et il aime le faire avec la fiction.

Philip Roth : Indignation

"...La façon terrible, incompréhensible dont nos décisions les plus banales, voire comiques, ont les conséquences les plus totalement disproportionnées." Cette phrase résume le livre de Philip Roth : chance et destinée, morale et indignation. Indignation dont beaucoup des personnages de l'auteur sont imprégnés.
C'est le portrait d'un jeune homme de Newark, Marcus, qui ne se soumet pas. Incapable d'accepter les conventions, il ne se résignera jamais. Eternel révolté, il refusera toutes les tyrannies.
Pourtant le héros est un gentil garçon juif, tout le monde le trouve gentil, même lui. Etudiant brillant, sportif, il aide dur son père dans sa boucherie kascher. Pour fuir son père devenu paranoïaque et l'empêche de vivre, il s'inscrit dans une université de l'Ohio.
A force de rébellion et d'impuissance, il va s'isoler et d'incidents en incidents il sera exclu et partira à la guerre. Le suspense finement mené nous fera comprendre que Marcus, se pensant mort, nous raconte son histoire de l'au-delà. Je n'en dirai pas plus.
Sur fond de guerre de Corée, Roth nous entraîne dans les années 1950 où conservatisme, morale, puritanisme pèsent sur la société.
Il décrit l'intolérance qui règne dans les universités à cette époque en imposant les offices religieux, en surveillant la liberté des étudiants et sauvegardant coûte que coûte les apparences.
C'est aussi l'histoire d'une peur, celle de la guerre. C'est aussi l'histoire d'une Amérique qui ne se lasse pas de donner des leçons et qui envoie des jeunes de 20 ans mourir à la guerre.
Comme d'habitude Roth fait subir à son personnage une libido intense et sa rencontre avec Olivia, Reine de la fellation, n'arrange rien. Les descriptions des samedis soirs arrosés où les étudiants en érection essaient d'aller au bout de leurs désirs, sont affreuses et drôles. Le sexe toujours présent, pour cet auteur qui reste quand même un éternel libertin.
Les scènes de vie de cette famille juive et de la boucherie kascher sont pittoresques et se lisent avec beaucoup de plaisir.
C'est un roman vif, intense et cruel sur l'impact des choix personnels à un moment donné de l'histoire mondiale. Si Roth écorche et bouscule l'Amérique et son hypocrisie puritaine des années 50, il nous montre avec force comment une vie peut sombrer dans la tragédie.

lundi 27 septembre 2010

Philippe Claudel : L' Enquête

Le dernier roman de Philippe Claudel raconte, à travers une enquête inquiétante, la déshumanisation des personnes. Un homme surnommé l'Enquêteur a pour mission de se rendre dans une entreprise pour comprendre la cause des suicides du personnel de plus en plus nombreux. Le lecteur ne peut que penser à l'actualité en lisant ces pages d'une description féroce. Mais ce n'est qu'un prétexte et c'est au coeur de la folie et de l'irréalité que Claudel nous entraîne.
Aucun nom n'est donné aux personnages de cet hallucinant roman. Seulement des fonctions : le Guide, le Vigile, la Géante, le Psychologue...., aucune identité. Aucune situation géographique hormis une ville inconnue, une entreprise gigantesque qui fait tout, voit tout, organise tout, même la fin.
Au début du roman, le lecteur sourit et rit des mésaventures que rencontre l' Enquêteur : pas de taxi, il ne connaît pas la ville, il est perdu, cherche un hôtel, il neige... Au fil des personnages rencontrés le malaise augmente et le lecteur rit mal. Tantôt sympathiques, tantôt agressifs ils évoluent dans un univers incompréhensible et obéissent à des codes que l'enquêteur n'arrive pas à comprendre pas. Toutes les situations sont irréalistes. Le lecteur assiste impuissant à la déchéance de cet homme qui refuse cette incompréhension. Même en gardant sa lucidité de sa réalité il sombrera dans l'oubli de son identité, et dans la folie qui va le gagner malgré sa résistance.
Fable cauchemardesque qui n'est pas sans rappeler celles de Kafka, elle nous interroge sur l'anonymat de l'homme dans une société impitoyable qu'il s'est évertué à construire.
L'homme annihilé par un monde qui devient de plus en plus impitoyable et surtout incompréhensible.
Claudel nous sert une écriture subtile et percutante pour nous entraîner dans des zones sombres, celles des frontières.
Impossible de lâcher ce livre, il se lit d'une traite et ensuite on ne peut oublier cet homme et sa déchéance.

Audur Ava Olafsdottir : Rosa Candida

Avec son premier roman l'auteur nous emmène sur les traces d'un héros, ordinaire et bien sympathique. Jeune homme de 22 ans et tout jeune père par accident, Arnljotur, quitte son vieux père et son frère jumeau autiste et son île de lave. Il part afin de restaurer une très vieille roseraie située dans un monastère sur le continent. Il fera de ce voyage un parcours initiatique lumineux et cherchera des réponses à ses doutes. Amoureux de la nature en général et des roses en particulier, il nous entraîne dans une vie de candide attachant où rien de spécial ne se passe. Les personnes qu'il rencontre font ressortir toute la beauté de la vie dans ce qu'elle a de plus simple, de plus vrai et de bon.
Les soirées passées avec un moine féru de cinéma lui permettront d'aborder les questions sur la vie, la mort, l'amour et d'apprendre ainsi à se connaître.
L'absence de repaire de lieu et de temps laisse le lecteur dans une atmosphère de conte tout à fait original.
Les descriptions de la nature, des plantes sont d'une grande poésie et confèrent à ce roman une infinie douceur.
C'est une lecture apaisante mais ce n'est pas vraiment ce que je recherche et ce que j'aime quand je lis.



vendredi 24 septembre 2010

Alice Ferney : La conversation amoureuse

Dans ce roman Alice Ferney nous raconte dans style très élégant les relations de couples et particulièrement celles d'une passion amoureuse. Une histoire d'adultère très classique. C'est à dire, l'homme éternel séducteur et prédateur et la femme amoureuse, très amoureuse.
Plusieurs couples se préparent à passer une soirée ensemble. Enfin les hommes devant un match de boxe et les femmes entre elles. Pauline, mariée , et Gilles en instance de divorce n'accompagnent pas leur conjoint respectif à cette soirée. L'auteur nous raconte leur rencontre, leur première soirée et leur conversation amoureuse.
Les mots sont là, le trouble naissant, le jeu de la séduction, le plaisir à venir. Dans une écriture lumineuse Alice Ferney nous relate une histoire tout simplement incorrecte. Elle donne la voix, l'émotion à la transgression, aux interdits.
C'est un livre qui trouble beaucoup par la justesse des mots, l'émotion intime nous est dévoilée et analysée aussi bien chez l'homme que la femme.
Il nous montre combien le quotidien use le couple, la passion et la vigilance qu'il faut pour sublimer le désir perdu et rendre lumineux l'amour en fuite.
C'est aussi une façon de concevoir le couple. Un homme et une femme que tout sépare vont se découvrir dans le secret d'une rencontre. Dans cette conversation amoureuse ils se diront ce que la société leur interdit, à savoir que la passion peut arriver à tout moment, que le désir qui couve à un âge mûr est plus fort peut être que celui de la jeunesse.
C'est aussi un instant magique celui où l'inconnu devient un homme ou une femme que l'on va aimer.
Le texte est très beau, le peu de dialogue rend les silences plein de promesses. C'est bien aussi de se dire que dans la vie même si des chemins sont pris, l'aventure est là.

dimanche 12 septembre 2010

Olivier Adam : Un coeur régulier

Dans son dernier roman, Olivier Adam nous sert une fois de plus une histoire difficile de quête et de renaissance, de mal être, de suicide, de survie aussi.
Sarah ne se remet pas du décès (suicide ?) brutal de son frère adoré dont elle avait été si proche, son double même. Elle s'en était pourtant éloignée ou plutôt son rôle d'épouse et de mère avait rendu le comportement destructeur de son frère incompréhensible. Nathan était un rebelle fragile et traînait avec lui tous les maux que la société inflige aux plus faibles . Il n'avait adhéré à aucun système, à aucune vie, à aucun amour sauf celui pour sa soeur. Il a tout vomi, tout rejeté . Au bout de toutes ses nuits de malheur et d'angoisse, il a cherché la lumière. L'alcool, la dérive, l'insomnie finissaient de l'anéantir un peu plus.
Sarah, elle, n'a pas voulu se poser les mêmes questions. Elle a avalé, de travers mais elle a digéré : mariage raisonnable, vie bourgeoise, enfants corrects et mari gentil.
C'est en partant pour le Japon, sur les traces de son frère que ce dernier voyage avait pourtant apaisé, que Sarah va enfin se retrouver.
Olivier Adam sait trouver les mots au bord du coeur pour traduire la souffrance de ces personnes que la vie broie. Il nous dépeint une société implacable qui ne supporte ni faiblesse ni retenue.
J'ai aimé le portrait de Nathan à travers le récit de Sarah. Présent et souvenirs alternent. Les lignes sur leur enfance sont d'une grande émotion. Deux petits animaux en quête de chaleur et d'amour qui n'ont fait qu'attendre une caresse. Les mots toujours en attente, l'amour au bord des larmes, la douleur à n'en plus finir et la renaissance que l'on espère pourtant.
J'ai juste été un peu déçue par l'épisode sur le Japon. Les personnages m'ont paru trop dans l'abstrait et ne m'ont pas autant touchée que l'histoire de Sarah et Nathan. La description des paysages japonais m'a semblé froide.
Mais le style, la narration si caractéristiques à l'auteur nous chavirent dans ce récit d'une souffrance décrite avec des mots d'une grande beauté.




Jean Mattern : De lait et de miel

Le titre m'a interpellée, je le trouve très beau et le livre d'une grande sobriété tout en délicatesse.
Sans complaisance, un vieil homme arrivé à la fin de sa vie raconte à son fils par bribe ses souvenirs. Il lui demande de retrouver Stefan son ami, violoncelliste, quitté brutalement sur un quai de gare. C'était en 1944 à Timisoara en Roumanie et l'Histoire les avait rattrapés.
Le narrateur dans une grande retenue nous explique leur fuite de Timisoara, atteint du typhus il a failli perdre la vie, ensuite au moment de l'insurrection hongroise en 1956, il choisira l'exil et partira pour la France. Rapatrié comme d'autres Roumains du Banat d'origine française, il arrive en Champagne où il rencontrera Suzanne, réfugiée hongroise. Elle deviendra sa femme pour la vie et le départ d'une autre existence.
Il lui promettra une vie "de lait et de miel" mais un drame les marquera à jamais.
Amoureux fou de sa femme, il ne confiera rien de ses souvenirs, des pertes qui le hantent, des misères et des souffrances de son pays. A jamais il se sentira étranger.
Avec beaucoup de pudeur, Jean Mattern nous sert une saga familiale marquée par la guerre et l'occupation . L'écriture sobre nous décrit la vie de ces gens taiseux dont les silences et les secrets composent une mélodie mélancolique sur fond d'exil déchirant.
J'ai trouvé intéressante cette page d'histoire d'Europe de l'Est et de ces roumains d'origine française que le Général de Gaulle avait fait rapatrier.
L'émotion et la réflexion accompagnent la lecture de ce roman sur l'exil qui habitera à jamais ces hommes et ces femmes, et l'amitié qui résiste à la séparation , à l'absence. Dire ce qui a été tu pendant toute une vie, sans excès, avec une grande sensibilité et trouver enfin les mots qui libèrent.

jeudi 2 septembre 2010

Linda Lê : Cronos

Le dernier roman de Linda plonge le lecteur dans l'effroi de la déshumanisation organisée et orchestrée par deux hommes : le Grand Guide et son ministre de l'intérieur, Karaci, surnommé la Hyène. A la suite d'un coup d'état, ils ont installé une dictature sanguinaire et transformé le quotidien en enfer.
Dans la ville de Zaroffcity, une femme, l'épouse malgré elle de Karaci, nous fait partager sa vie de solitude, de peur, d'humiliation. A travers un récit épistolaire, elle raconte à son frère, artiste en exil, son combat, sa résistance, sa lutte pour sa dignité.
Dans un huis clos étouffant et dramatique, l'auteur nous sert une écriture d'une grande virtuosité. Les mots ont quelque chose de suranné et pourtant l'horreur semble actuelle.
Tout est dit dans la première phrase tant elle résume l'histoire politique : "le soldat frappe à coups de crosse l'homme qui serre le livre contre lui." A mort, les intellectuels, les artistes !
Les lettres écrites par Una sont belles, tristes, les portraits d'hommes et de femmes martyrisés et assassinés par son mari vont l'amener à prendre possession de son destin.
Elle ne se résignera pas et malgré la paranoïa de son mari, son obsession de la sécurité elle rencontrera des résistants, entrera dans l'organisation d'une lutte contre le pouvoir.
C'est un livre déchirant sur la solitude, l'abnégation, l'espoir quand plus rien ne le permet.
Ne jamais se résigner, même quand les bourreaux sévissent.
Ne jamais éteindre la plus petite étincelle qui demeure en chacun de nous. Linda nous décrit des dictateurs grotesques de cruauté et pathétiques, la finesse et la délicatesse emportent les derniers mots de cet admirable roman.

samedi 21 août 2010

Claudie GALLAY : L'amour est une île

Le dernier roman de Claudie Gallay entraîne le lecteur dans l'été du festival d'Avignon en 2003, l'année de la canicule et de la grève des artistes. La ville, les touristes, les artistes et surtout les protagonistes de ce roman nous envoûtent tandis que la chaleur nous écrase.
C'est l'histoire d'un texte, celui de Paul un jeune auteur mort quelques années plus tôt et qui tient le rôle de poète maudit. Odon, directeur de théâtre, le monte sur scène. Nous rencontrons aussi Mathilde, l'ancienne mais toujours présente passion d'Odon devenue une comédienne célèbre, Marie la jeune soeur de Paul qui vit pour et dans sa mémoire.
Les personnages sont durs, parlent peu, avancent dans la vie avec leur fardeau. Le lecteur sent que la vérité n'apportera pas l'espoir. C'est une tragédie que l'on sent venir. L'avenir est sans couleur. Ils vont se croiser sans rien lâcher de leur passé.
Mais le récit nous sert surtout la passion, celle des mots, du théâtre, de l'amour fou.
Ecrit à la manière de petites scènes, l'écriture est sèche vive et pourtant fournie.
Nous déambulons dans Avignon, les détails sont magiques et l'atmosphère du festival vraie.
La chaleur devient vite étouffante comme le suspens que Claudie Gallay distille finement tout au long de l'histoire.
J'ai aimé la rencontre avec ces personnages très attachants mais aussi les hommages rendus à Gérard Philippe, Jean Vilar et ces autres artistes connus.
Une très belle histoire d'hommes et de femmes remplis par la passion mais qui n'arrivent pas à être heureux.

vendredi 20 août 2010

Laurent Gaudé : Ouragan

Le dernier roman de Laurent Gaudé emporte le lecteur en plein coeur du cyclone Katrina qui a dévasté la Louisiane en 2005. Sans jamais le nommer, il nous décrit des scènes apocalyptiques et touche par touche met en scène les personnages de cette histoire. Ils vont se croiser, se déchirer, se reconnaître, mourir. Une chose est sûre, plus rien ne sera pareil.
Les protagonistes de cette aventure nous plongent dans le chaos et le désespoir. Laurent Gaudé insiste sur la défaillance des systèmes de sauvetage, cette population oubliée, humiliée, souillée qui porte le Noir comme couleur de désespoir et de fierté.
Joséphine, 100ans et plus, a fait de sa négritude son emblème d'existence et de résistance, Rose jeune mère peu aimante et que la vie et les hommes ont maltraitée, Kenau son ancien amour qui revient lui dire les mots oubliés, des prisonniers abandonnés qui s'évadent, un révérend mystique complètement allumé qui voit dans cette catastrophe la main de Dieu et d'autres encore.
Tous au sein de ce cataclysme de la nature, vont montrer leur part cachée. Dans une nuit d'enfer, ils vont chercher le chemin de la vérité, à travers la violence, les regrets, les chagrins ultimes, ils essaieront de donner un sens à leur existence, des réponses aux questionnements de la vie.
Comme le dit Sandor Marai en exergue du livre : "Les questions sont : Qui es-tu ?, qu'as-tu fait ?...A qui es tu resté fidèle ?", ces pauvres héros essaieront à leur manière d'y répondre.
Laurent Gaudé avec une plume magnifique nous fait entrer, au rythme des éléments qui se déchaînent, dans une profonde analyse humaine. Le lecteur est pris par cette écriture forte, même si au début la mise en place des personnages peut sembler difficile. Le roman reste très puissant.



jeudi 12 août 2010

Erri de Luca : Le jour d'avant le bonheur

Dans son dernier roman, l'auteur nous entraîne à Naples, sa ville natale et nous la décrit aussi sensuelle et caressante que violente et impitoyable. Le narrateur, un petit garçon de 13 ans, nous raconte son histoire. Celle d'un petit orphelin de l'après-guerre, dans une ville qui n'a pas toujours été glorieuse mais qui a su garder sa fierté. Elevé par un concierge, Don Gaetano, qui lui apprendra la vie plus que les livres qu'il dévore, plus que l'école. La vie avec des mots simples, voilà ce que lui donne cet homme si attaché à lui.
Passant du conte initiatique au roman d'une vie, nous sommes touchés par les mots, remplis de lumière et d'absolu. L'auteur évoque les tourments de l'amour, les doutes de l'adolescence et le besoin de connaître ses origines. Nous suivons avec beaucoup d'émotion, ce petit garçon dans l'apprentissage des codes d'honneur et de vie. Depuis la loge de concierge il observe le monde, et les rencontres qu'il fera marqueront sa vie d'homme. Aidé par Don Gaetano qui voit tout, il apprendra. Sa rencontre avec une veuve et ensuite une jeune fille très particulière le conduira sur les chemins du plaisir et de l'amour.
Erri de Luca nous décrit les paysages napolitains avec beaucoup de magie, à la manière d'une confession il nous émeut sur ce récit initiatique d'un homme qui essaie de panser la blessure d'être fils de personne.

vendredi 30 juillet 2010

Henry Bauchau : Le boulevard périphérique

Dans ce roman, l'auteur nous raconte le destin d'un homme, peut être le sien. A travers différentes étapes de sa vie, il entraîne le lecteur dans les souvenirs de cet homme qui a connu la guerre et pendant laquelle son meilleur ami, Stéphane, a connu une mort tragique. Alpiniste, lumineux, il est entré dans la résistance. Le narrateur a rencontré son bourreau, un certain Shadow. Etre démoniaque, fasciné par sa victime.Tous ces souvenirs reviennent le visiter à chaque fois qu'il prend le périphérique pour aller voir sa jeune belle fille mourante à l'hôpital. La mort, le lien entre les vivants et les mourants, ceux qui sont déjà partis et ceux qui vont suivre.
Henry Bauchau ne donne pas des réponses, il pose des questions. Rechercher en soi, toujours plus loin et essayer de trouver un équilibre entre espérance et désespérance. Trouver ses portes et pouvoir les ouvrir afin que l'imaginaire rejoigne la vérité et le quotidien.
Les mots simples, la quête de soi, son dépassement parfois, Henry Bauchau nous les livre d'une façon poignante dans un récit obsédant à suffoquer.
Bonheur d'exister dans une vie que l'on sait déjà condamnée. Alors, comme sur le périphérique qui se déroule en continu, la vie nous offre aussi la possibilité de prendre des sorties pour de nouvelles histoires.
Ce n'est pas un livre très gai, il nous met face à la jeunesse qui n'est plus, à la mort que nous portons tous en nous, aux mots qui nous manquent parfois, souvent même, à la lâcheté aussi.
Le lecteur est quand même porté par cette fabuleuse façon d'écrire et de décrire de l'auteur.




mardi 27 juillet 2010

Sylvie Germain : La chanson des mal-aimants

L'auteur nous raconte la vie d'une femme, Laudes-Marie, abandonnée à la naissance, reniée par un père, une mère qui malgré elle lui manquera toute sa vie. "Après elle, j'ai claudiqué à perdre haleine toute ma vie".
Le ton est donné. Les êtres que Sylvie Germain par le biais de son héroïne croise, sont ceux que la vie a laissés de côté, ceux que nous croisons sans prêter attention, qui ne possèdent que leurs rêves et souvent que leurs cauchemars.
C'est l'histoire de Laudes-Maris, enfant albinos, blanc comme la neige en Août , mois de sa naissance. Une neige que personne ne souhaite, n'imagine même. A la fin de sa vie, elle retourne vivre dans les montagnes près de ses animaux. Elle nous raconte sa vie misérable du manque d'amour. Elle a croisé des gens, travaillé comme servante dans des bars, hôtels, famille même dans un bordel de campagne.
Une vie de femme qui n'était pas dans les normes et qui pourtant n'a fait qu'aller vers les autres pour les aider, les comprendre. Elle a vécu une vie de compassion tout en préservant sa solitude et sa marginalité.
L'écriture de Sylvie Germain est belle, limpide et nous décrit à travers ces personnages notre monde et ses douleurs. Le récit se parcourt calmement, sereinement et à travers sa poésie donne une note d'espoir.
Un petit bémol concernant les visions de Laudes-Marie. Je les trouve trop hermétiques, obscures et finalement en trop dans le récit.
Et puis la compassion, un certain fatalisme, fil conducteur du livre, à un moment donné entraîne le lecteur dans une finalité convenue.
Par contre j'ai aimé la rencontre de Laudes-Marie avec l' écrivain de romans policiers et son travail chez lui . Elle va enfin trouver dans les livres, les mots qui lui ont toujours manqué pour répondre à ses silences.


jeudi 22 juillet 2010

Jean Paul Dubois : Les accommodements raisonnables

L'histoire commence par un enterrement, celui de l'oncle de la famille Stern, Charles. Les protagonistes de cette saga se trouvent à un moment donné de leur vie dans un profond chaos.
A commencer par l'oncle qui décède, fortuné, vaniteux, détesté et pourtant si envié. Le frère Alexandre devient l'héritier et endosse son nouveau rôle de riche avec une facilité surprenante, lui qui haïssait tellement la façon de vivre de son frère. Et puis il y a Paul, fils d'Alexandre, écrivain-scénariste, un peu raté. Anna sa femme complètement dépressive fuit dans le sommeil la réalité de son couple inexistant.
Paul saisit une opportunité et part travailler à Hollywood. Pendant une année nous assistons aux bouleversements dans cette famille à un moment critique. Chacun tourne autour de l'autre, s'observe, se quitte, revient pour mieux repartir, bref s'accommode , de la vie et des autres.
Jean Paul Dubois analyse finement la société américaine où l'homme se perd dans l'illusion, où le rêve devient cauchemar et nous met en garde contre cette société , copie exacte de la nôtre mais en pire...
Et puis surtout il est question d'accommodements, ceux que l'on fait par lâcheté, toutes les compromissions, les non-dits, les manquements tous ces arrangements pour s'accommoder de soi mais aussi des autres, de la vie pour continuer raisonnablement.
Dans la vie, à certains moments critiques, douloureux, des parenthèses s'ouvrent où tout semble bouleversé sauf le fondamental.
L'écriture est mordante au début, drôle , pathétique dans la description des hypocrisies des personnages elle se perd un peu trop dans ses accommodements. C'est dommage, l'histoire méritait d'être plus percutante, mêmes dans les doutes, les remords, les personnages auraient gagné plus de profondeur.





John Updike : Villages

Le dernier roman de Updike, décédé en Janvier 2009, est paru en France quelques mois après sa mort. L'univers et la thématique chers à l'auteur sont présents dans ce livre, à savoir le sexe et ses plaisirs dans une Amérique en constante évolution.
Le héros, Owen, au soir de sa vie nous fait revivre à travers ses rêveries près d'un siècle de l'histoire américaine. Avec lui nous suivons ce que vivre veut dire dans ces villages du début du siècle d'une Amérique provinciale, celle des classes moyennes.
Marié à Julia, sa deuxième épouse, Owen, retraité et génie de l'informatique, se rappelle surtout des femmes toutes les femmes, mère, épouse, voisines, maîtresses qui ont vécu dans ces lieux et l'ont aidé à grandir, vivre, s'affranchir.
Il a aimé les femmes et a recherché dans ses aventures sexuelles une façon de continuer sa vie d'époux insatisfait auprès de Phyllis sa première femme.
Arrivé au bilan de sa vie, Owen n'arrive pas à clôturer tous les comptes.
Dans une écriture forte, crue et torride Updike nous dresse le portrait d'une Amérique ordinaire, bourgeoise bien pensante pendant la deuxième partie du XXè siècle et qui se cherche des modèles dans une vie d'une banalité quotidienne cruelle.
Avec une nostalgie pleine d'humour, l'auteur nous dépeint des soirées et dîners entre amis et voisins. Il n'est question que d'adultère, il n'y a que ça et l'argent qui les fait vibrer, derrière les conventions. C'est absolument impudique et délectable.
Les portraits des femmes rencontrées, aimées, séduites et délaissées sont tout simplement ambigus mais humains, surtout humains.
Dans une description efficace d'une société américaine qui balance entre regrets, puritanisme, révolution et liberté sexuelle, l'auteur nous entraîne dans une chronique où la fiction amoureuse et sentimentale se mêle à la réalité de l'évolution économique et sociale.
Un très beau livre, cruel et émouvant.

samedi 26 juin 2010

Vacances

Un peu de vacances, loin....
Je lirai, je vous raconterai.....
à bientôt

jeudi 24 juin 2010

Eleni YANNAKAKI : Les chérubins de la moquette

24 heures de la vie d'une femme, plusieurs auteurs ont déjà écrit sur ce thème. Il s'en passe tellement ! Entre le ménage, les courses, la cuisine, les enfants, le mari.... et les amants !
Voilà, je voulais lire un roman grec c'est fait !
Surprenant, déroutant. Les chapitres sont ponctués par les heures de cette femme et sous la forme d'un long monologue elle nous fait découvrir sa vie. Vie d' épouse, de mère, de femme c'est la vie de Maria.
Le lecteur peut se lasser de cette obsession pour le ménage qui la possède très tôt le matin, l'auteur ne nous épargne aucun détail fastidieux de cette lutte contre la saleté et de cette recherche effrénée du meilleur produit ménager. Bref c'est à première vue 24 heures dans la vie ordinaire d'une femme ordinaire.
Epouse d'un architecte, elle a abandonné de brillantes études artistiques pour se marier fonder une famille, se faire une place dans la bourgeoisie d'Athènes, que peut elle rêver de mieux ?
Au fur et à mesure la confession se fait douloureuse, nous constatons que la journée n'est pas ordinaire. Il y a un an Maria apprenait la mort de son amant. Elle en a eu d'autres avant. Par bribe, entre cruauté et humour, entre désespoir et peur, mauvaise foi et cynisme, l'auteur met de la profondeur dans cette femme.
Eleni Yannakaki transforme cette desperate housewife en femme tout simplement rattrapée par la vie et qui à un moment donné s'est oubliée.